Entre mythes et légendes, la Dernière Licorne de Peter S. Beagle est avant tout un roman qui invite au voyage, à la réflexion et nous fait nous interroger sur la nature réelle de ce que nous voyons et entendons. Le monde est-il réellement tel que nous le percevons ou recèle-t-il une magie invisible à nos yeux?

Fiche technique

La dernière Licorne aux éditions Denoël

  • Auteur : Peter Soyer Beagle
  • Titre original : The Last Unicorn
  • Titre français : la Dernière Licorne
  • Date de la première publication : 1968
  • Genre : Fantasy
  • Niveau : Lecteur moyen

Bibliochimie

Si un alchimiste voulait recréer ce livre dans son alambic, quelles choses pourrait-il utiliser comme ingrédient ? 

– L’ambiance des contes anglo-saxons

– Un monde en passe de perdre sa magie et sa fantaisie

– Un soupçon de poésie et de philosophie

A quoi s’attendre ?

Vivant en toute quiétude dans une forêt qui ne vieillit jamais – enfermée dans un éternel printemps – la dernière licorne ignorait qu’elle était l’unique représentante encore vivante de son espèce, jusqu’à ce que le hasard vienne s’inviter dans sa forêt sous la forme de deux chasseurs.

Espionnant leur conversation, celle-ci se rend alors compte qu’elle est peut-être la dernière de sa race. Alors que le temps n’avait jamais eu de prise sur elle, voilà que celui-ci semble soudain la rattraper à toute vitesse, aussi se met-elle en route sans tarder. Ainsi débute le conte dans lequel elle rencontra un papillon chantant des chansons idiotes, où elle sera emprisonnée dans une cage par des Tziganes et où elle fera la connaissance de Schmendrick, un magicien sympathique mais tout à fait incompétent, puis celle de Molly, une femme au fort caractère qui suit une bande de hors-la-loi. Ensemble, ils décident d’affronter le Roi Haggard et son horrible Taureau Rouge, qui semblent être responsables de la disparition des licornes.

Quelques mots sur l’auteur et son œuvre

L’auteur avec son oeuvre

Dire que la Dernière Licorne est une œuvre importante dans les pays anglo-saxons est un euphémisme. Véritable phénomène, classique de la littérature au point d’être étudiée à l’école, la Dernière Licorne s’est également vue adaptée en film au cinéma et en série animée. L’auteur l’avoue lui-même dans la préface du livre « la Dernière Licorne est un livre que les gens connaissent sans connaître mes autres ouvrages ». Mais le succès de cette œuvre possède également un revers à sa médaille et l’auteur avoue qu’il répugnait à parler de cette œuvre tant ses lecteurs ne cessaient de disserter à son sujet au détriment de ses autres œuvres. Beaucoup de personnages de ce conte sont tirés de la vie de l’auteur, comme le Magicien Schmendrick, qui n’est autre que le héros des histoires qu’il racontait à sa fille, ou le papillon, qui est un autoportrait de l’auteur lui-même. La Dernière Licorne a ceci de particulier qu’elle tourne autour des choses qui ne sont pas ce qu’elles semblent être. Ainsi l’auteur joue-t-il sur le sens des mot et sur le pouvoir de ceux-ci tout en opposant la réalité à ce que l’homme perçoit de son univers. En plus de cela, une grande part de philosophie et de poésie vient assaisonner cette œuvre d’un léger goût de conte à l’ancienne pour le plus grand plaisir du lecteur.

Avis de la Rédac’

Keul : La Dernière Licorne est considérée – à juste titre – comme un classique de la littérature fantastique. Publié en 1968, l’auteur nous propose ici un roman plein de poésie et qui traite du merveilleux d’une manière quelque peu différente des classiques de l’époque. Bien que reprenant des thèmes majeurs de la chevalerie et des romans de la table ronde – comme l’éternelle lutte du Bien contre le Mal, l’amour pur, le courage et la loyauté qui s’opposent à l’orgueil et l’égoïsme par exemple – l’auteur les détourne, les égratignant légèrement au passage sans jamais s’en moquer, comme le feront d’autres auteurs plus tardifs comme Pratchett. Ici point de magicien omniscient et totipotent, mais un magicien manqué, qu’on pourrait presque qualifier de prestidigitateur tant il est incompétent dans ce qu’il fait. L’héroïsme est également dépeint comme n’aboutissant pas à la conquête du cœur de la princesse, mais contribuant à éloigner le héros de celle-ci, ce qui prend le contrepied total des codes classiques. Finalement, les mythes sont également légèrement tournés en dérision, comme le mythe anglo-saxon de Robin des Bois où les hors-la-loi ne volent pas au riches pour donner aux pauvres mais volent au pauvres pour payer les riches afin qu’ils ne se fassent pas arrêter, allant jusqu’à inventer leur propres histoires héroïques pour masquer leurs méfaits. Au final, l’histoire semble tourner autour d’une simple question. Que faire pour retrouver la fantaisie et la magie qui nous émerveillait une fois celle-ci perdue et ainsi mettre fin aux regrets qui nous tenaillent ? Qu’il s’agisse du magicien ou de la licorne, chacun recherche une chose perdue qui rendait le monde meilleur qu’il ne l’est aujourd’hui. La licorne recherche ses semblables qui émerveillaient le monde de leur féérie et Schmendrick recherche la magie qui lui permettrait de rendre le monde meilleur. L’œuvre s’interroge sur la différence entre ce qui est dit et ce qui est fait, et se place donc comme un successeur aux contes et légendes et un incontournable de la fantaisie à l’ancienne.