Sabre de neige (le) / Salomé Han

Mikaua : Je dois avouer une chose d’entrée de jeu : j’ai lu le résumé de Sabre de Neige un peu trop vite apparemment et j’ai du coup raté la mention que le protagoniste, Isao, « aime éperdument » son maître, Shiro. Si je l’avais vue, j’y aurais peut-être réfléchi à deux fois avant de le lire. Je vous vois préparer les fourches et les torches, dans le fond : non, ce n’est pas parce que la romance est entre deux hommes que ça me dérange, mais parce qu’elle est entre un élève et le maître qui l’a élevé. La plupart des relations de ce genre que j’ai vues jusqu’ici sont toxiques et/ou malsaines, et le Sabre de Neige ne fait malheureusement pas exception. Entre les signaux très contradictoires envoyés par le maître à son disciple, les sentiments presque obsessionnels d’Isao, et le fait que Shiro a été une figure parentale pour Isao d’aussi loin que ce dernier s’en souvienne – même si c’est relatif vu son amnésie –, le roman m’a inspiré un sentiment de malaise diffus dès la 30e page qui ne m’a ensuite plus quittée tout au long de la lecture. Et le fait que cette relation soit plus ou moins justifiée par le scénario à la fin n’arrange rien : le fait est que le lecteur est témoin pendant 500 pages d’une relation toxique qui donne juste envie de secouer le protagoniste pour lui faire ouvrir les yeux.

Ce qui m’amène à une autre partie qui m’a déplu dans ce roman : son protagoniste. Je suis pourtant quelqu’un de patient et de bon public dans mes lectures, vous pouvez demander au reste de l’équipe Geek-It. Mais Isao… franchement, j’ai eu envie de lui coller des claques tout du long de ce roman tellement il est passif. Sa quête n’avance que parce que d’autres personnages interviennent, et ses diverses variations de « ô mon maître, regardez quelle loque je deviens sans vous » tandis qu’il se laisse limite dépérir ne font rien pour le rendre plus sympathique. Il faut attendre les trois-quarts du livre pour que, dans une spectaculaire volte-face qui rappelle les films d’arts martiaux, il se décide à devenir proactif dans sa quête. Quant à sa naïveté déprimante… d’accord, Isao a été élevé dans un monastère au fin fond de la forêt, et c’est peut-être la manière de l’autrice d’éviter le piège du protagoniste qui sait tout faire à la perfection par miracle – ce qui, j’avoue, est également très agaçant à lire – mais à ce point… on dépasse rapidement le point où on a de la compassion pour lui pour en revenir à l’envie de lui coller des claques.

Enfin, à peu près au milieu du roman, on trouve une scène vraiment dérangeante où le protagoniste se fait agresser sexuellement – autant appeler un chat un chat –, mais écrite de telle manière que on en viendrait presque à douter s’il y a consentement ou pas. Sachant que, en prime, cette scène ne sert strictement à rien pour le scénario et que cet épisode ne sera plus jamais mentionné après, j’ai trouvé ça vraiment inutile et déplacé.

Mais à côté de cela, le style de l’autrice est agréable : direct, sans trop de fioritures, il se laisse lire agréablement. Niveau ambiance on se croirait dans un film d’arts martiaux d’Asie, c’est plutôt bien rendu. Les duels sont également plus cinématographiques que réels et sont souvent assez vite expédiés – habituée des romans de R.A.Salvatore, j’aurais presque dit trop vite, mais c’est une question de goût et de style.

En résumé, si vous cherchez avant tout un roman de fantasy dans un univers japonais avec des duels épiques et également de la romance, passez votre chemin. Malgré l’impression que peut donner le résumé, le Sabre de Neige est clairement une dark romantasy, et sera en conséquence centrée sur les sentiments d’Isao envers son maître.